Maire de Melle, Sylvain Griffault soutient le mouvement antibassines. La commune vient d’accueillir campings, concerts et conférences, après avoir déjà servi de base arrière à Sainte-Soline l’an dernier.
Melle (Deux-Sèvres), reportage
« Petite cité de caractère », indique une plaque à l’entrée de Melle, dans les Deux-Sèvres. Son maire aussi semble en avoir, du caractère. Élu à ce poste en 2020 après un mandat en tant que conseiller municipal, Sylvain Griffault, 51 ans, s’affiche comme l’un des soutiens indéfectibles du mouvement antibassines qui échauffe le département et plus largement l’actualité nationale.
Un soutien qu’il aimerait tout de suite attribuer à l’ensemble des membres de sa liste « citoyenne et solidaire » qui a remporté les élections, un an après la fusion de cinq communes sous le seul nom de Melle, qui compte désormais 6 200 habitants. Car l’édile, aux allures de prof de fac avec ses cheveux bouclés et ses lunettes rondes, déclare d’emblée « mal assumer d’être mis en avant ».
Base arrière
Malgré cette pointe de modestie, Sylvain Griffault incarne celui qui ose aller au front pour assumer les positions de la municipalité. La dernière action en date ? L’accueil du Village de l’eau du 16 au 21 juillet en soutien aux manifestations. Chapiteaux, mégacantine et campings ont pris place à la ferme de la Genellerie, un site dont la commune est propriétaire et auquel l’équipe municipale cherche à rendre son usage originel. Plus de 10 000 personnes se sont rendues sur place, selon les organisateurs.
Forcément, c’est un remue-ménage pour une commune comme Melle. Qui n’en est pas à sa première : l’an dernier, elle avait aussi accueilli concerts, conférences et toilettes sèches en plein milieu du bourg, en marge des manifestations à Sainte-Soline. Melle était la seule commune environnante à avoir accepté de servir de « base arrière » aux associations et militants, alors que la manifestation était interdite par la préfecture.
Pour les organisateurs de la mobilisation antibassines, telles que les associations Bassines non merci, Attac ou le mouvement Les Soulèvements de la Terre, Melle fait donc figure de « municipalité courageuse et militante ». L’esprit rationnel étant sa boussole, Sylvain Griffault estime simplement que cet accueil suit la logique du programme sur lequel il a été élu.
Les racines de son engagement sont à chercher du côté de sa formation scientifique — c’est pour ça qu’il préfère dire « réserves de substitution » plutôt que « bassines », terme « qu’il laisse aux militants » — et de sa pratique du scoutisme protestant, le pays mellois étant un territoire du protestantisme français. Du scoutisme, il tient ses convictions écologiques, « plus pratiques que partisanes » : « Quand tu passes chaque été trois semaines dans un champ ou à la montagne, la nature est importante pour toi. »
Il retient aussi que rien n’était imposé côté religieux, à part « un temps de confrontation à la croyance des autres pour apprendre à devenir tolérant ». Un entraînement à la situation actuelle… Car il faut savoir faire face lorsqu’on s’en prend plein la figure, comme lorsque des agriculteurs sont venus le prendre à partie devant la mairie ce 4 juillet. Ou lorsqu’on est visé par une plainte déposée par 145 agriculteurs pour « préjudice moral et financier ». Comment fait-il face ? « Je supporte. Je suis un élu, mes convictions politiques ne sont pas secrètes, donc je les assume. Puis je suis fondamentalement non-violent », pose-t-il calmement.
Transparence
« Il est droit, honnête, transparent », égraine sa première adjointe, Sarah Klinger, pour mieux dessiner cette personnalité. La cheffe de file de l’opposition (six membres) de Melle, la socialiste Muriel Benelhadj-Sabourin, n’est pas tout à fait de cet avis. Si elle reconnaît avoir été avertie cette fois deux mois à l’avance de l’installation du Village de l’eau, elle reproche au maire de ne pas avoir créé d’espaces pour donner son avis sur le sujet, ni avec les élus de l’opposition ni avec les habitants.
L’échange, Sylvain Griffault l’attend plus directement sur le Village de l’eau. Plutôt que de chercher à convaincre à tout prix, il déclare tirer de son ancien travail d’animateur scientifique la nécessité d’apporter des connaissances et de faire des démonstrations pour aider les gens à se faire leur propre opinion. La sienne s’est forgée grâce aux arguments scientifiques qui décrivent les mégabassines comme une maladaptation au problème de l’eau en agriculture et préconisent les solutions fondées sur la nature. Avec une pointe de malice, il affirme aujourd’hui : «Aux mégabassines, je préfère les méga-haies» . ARTICLE / REPORTERRE .