Les chèvres à Roquefort des Corbières : un article dans  » Le Monde « 

A Roquefort-des-Corbières, des chèvres aident à prévenir les incendies

Dans ce village de l’Aude, les élus ont fait appel à un éleveur caprin pour débroussailler la garrigue. Une initiative que l’Office national des forêts juge inefficace

Jean Bergé et son troupeau, à Roquefort-­des-Corbières (Aude), le 22 juillet 2022.

Les quatre sabots flanqués dans la dense pinède du massif, elles mâchonnent tout ce qui s’y trouve. Depuis quelques semaines, les chèvres nettoyeuses de Jean Bergé sont employées au débroussaillage de la colline Saint-Martin, qui domine le petit village de Roquefort-des-Corbières, dans l’Aude. Une façon de renouer avec son histoire pastorale. Les troupeaux caprins et les vignes ont disparu depuis trente ans, laissant place à l’« envahisseur » : la garrigue, à perte de vue. « Nous sommes cernés, soupire le maire, Luc Castan, à l’origine de l’initiative. On court à la catastrophe, c’est une véritable poudrière, ici. »

Ce matin du 22 juillet, il fait 41 degrés, la chaleur est écrasante. « Au moindre départ de feu, on peut dire adieu à tout ça », s’inquiète ce vigneron retraité, fils de chevrier. Il pointe l’amas de petites maisons en pierre sèche en contrebas, où se nichent huit siècles de mémoire de bergers. Le village n’a pas reçu la moindre goutte de pluie depuis des mois. Et la prolifération des buissons de thym et de romarin, hautement combustibles, n’arrange rien. « L’année dernière, on a vu les pinèdes partir en fumée au nord et au sud. Au milieu, il ne reste que nous. »

Des siècles d’usage

Comme en Gironde ou en Bretagne, l’Occitanie n’a pas été ­épargnée par les incendies ces deux dernières semaines. Le 8 juillet, ce sont 10 hectares de garrigue qui ont été réduits en cendre à 5 kilomètres de Roquefort. A une heure du village audois, dans l’Hérault voisin, le feu a consumé près de 1 000 hectares, mardi 26 juillet. Tous les espoirs du maire reposent sur les frêles épaules des 90 bovidés. Ces chèvres de Rove ont été utilisées par les agriculteurs méditerranéens durant des siècles pour entretenir les zones arides et sujettes aux feux. Grâce à leur petite taille et à leur agilité, elles atteignent des sommets et des pentes où un humain ne saurait s’aventurer.

« Si peu de chèvres sur un tel espace, ça ne sert à rien du tout. Ce n’est pas la solution miracle contre les incendies. » Office national des forêts

« Allez, venez les filles, on y va, s’exclame Jean Bergé à l’intention de ses bêtes. Malice, Myrtille, avancez ! » Il est 11 heures ­passées, les chèvres doivent retourner au sommet de la colline pour se reposer jusqu’au début d’après-midi. En un mois, le ­travail du troupeau est déjà impressionnant. Les arbustes ont été complètement dépouillés de leurs feuilles. « L’herbe est coupée à ras, comme après le passage d’une tondeuse », se félicite l’éleveur.

Une expérimentation qui devra faire ses preuves

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