L’économiste Maxime Combes propose de nommer la vague de chaleur  » Total Energies 2 ( Reporterre )

La France a traversé deux vagues de chaleur en seulement deux mois. L’économiste Maxime Combes propose de les nommer d’après leurs responsables afin de « repolitiser » ces évènements climatiques extrêmes.

Maxime Combes est économiste. Il travaille notamment avec l’Observatoire des multinationales. Il a écrit Sortons de l’âge des fossiles ! Manifeste pour la transition (Seuil, 2015) et coécrit (avec Olivier Petitjean) Un Pognon de dingue mais pour qui ? L’argent magique de la pandémie (Seuil, 2022).


Reporterre — Vous aviez proposé de nommer la vague de chaleur de juin « TotalÉnergies1 ». Vous proposez de nommer la canicule actuelle « TotalÉnergies2 ». Pourquoi ?

Maxime Combes — Il y a une forme de fatalisme, d’abattement, de résignation face à ces vagues de chaleur. On a l’impression qu’elles nous tombent dessus, mais que l’on ne peut rien y faire. On le voit à la fois dans la population, mais également dans les réponses du gouvernement. On nous annonce cette canicule depuis quinze jours, mais il n’y a eu aucune mesure pour s’assurer que les services publics continuent de fonctionner et que les plus fragiles soient protégés. On ne nous parle pas non plus des responsables.

Donner aux vagues de chaleur le nom d’une entreprise permet de lutter contre cette résignation. Ça permet de repolitiser ces phénomènes, de remettre au cœur du débat public la question de l’urgence climatique et de ses responsables, et de débattre de la réponse à apporter en matière d’atténuation.

Comment cette nouvelle terminologie pourrait-elle changer notre perception des vagues de chaleur ?

Cela permettrait de mieux s’en rappeler et de faciliter la compréhension des enjeux. Un peu comme cela a été fait avec les cyclones. Tout le monde se souvient de l’ouragan Katrina [qui a eu lieu en 2005, aux États-Unis]. Plutôt que d’avoir « la canicule de 2003 », nous aurions pu lui donner un nom l’identifiant comme un évènement climatique extrême. Donner des noms montre que le réchauffement climatique se conjugue au présent. Il y a eu « TotalÉnergies1 », « TotalÉnergies2 », il y aura sûrement « TotalÉnergies3 », etc.

Ça permet également de sortir de l’idée selon laquelle ces vagues de chaleur ne seraient qu’un aléa climatique. Elles ne sont pas un aléa, mais la transcription concrète, dans notre vie de tous les jours, de ce que les scientifiques du Giec [1] n’ont cessé de démontrer dans leurs rapports depuis des années : que les vagues de chaleur seront plus nombreuses, plus longues et plus intenses si nos émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter. On entend encore, à la télé ou sur les réseaux sociaux, qu’il est normal qu’il fasse chaud. C’est normal qu’il fasse plus chaud l’été, mais ce n’est pas normal qu’il fasse 40 °C pendant quinze jours. Donner un nom aux canicules permet de montrer qu’il y a quelque chose d’anormal, qui va peut-être devenir la norme, mais qui est dramatique, problématique, et qu’il faut s’en occuper, comme on s’occupe d’un cyclone.

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