Nous vivons en ce moment une crise planétaire qui remet en cause bien des habitudes et bien des aveuglements . Cette crise globale est sans précédent , au moins depuis la dernière grande guerre . Et c’est la mondialisation effrénée , ultra-libérale , qui est en cause . Une mondialisation qui n’a été qu’une délocalisation des productions industrielles vers les états où les coûts salariaux étaient les plus faibles , que ce soit en Chine où bien dans les pays émergents . Cette mondialisation échevelée s’est encore accentuée avec les mouvements de population , permanents et massifs . Comme le dit l’écrivain Sylvain Tesson » un nouveau dogme s’est institué : tout doit fluctuer , se mêler sans répit , sans entraves, donc sans frontières . Circuler est bon , demeurer est mal . Plus rien ne doit se prétendre de quelque part , puisque tout peut être de partout » . Et les chiffres le démontrent : 4 milliards de passagers ont pris l’avion en 2017 et , l’an dernier il y a eu 1,4 milliards de touristes dans le monde . Hubert Védrine , l’ancien ministre des Affaires Etrangéres pointe lui aussi du doigt » ce mode de vie hédoniste, individualiste et festif qui se traduit par une mobilité permanente , sans limites et sans entraves » …
Aujourd’hui , cette crise majeure nous oblige à repenser tout cela . Une grande réflexion est engagée , mais le combat s’annonce très rude entre les propositions alternatives et les puissantes forces économiques et politiques conservatrices qui n’entendent pas renoncer à diriger le monde comme elles l’ont toujours fait jusqu’à présent .Dejà , l’ on nous annonce le déploiement de milliards de dollars, d’euros et de yuans pour relancer l’économie telle qu’elle fonctionnait avant la crise .
De nombreuses voix s’élèvent pourtant pour tirer les leçons de cette crise , penser le monde différemment et lancer les mutations . Nous devrions les écouter , comme celle du sociologue Edgar Morin : » Il faut poursuivre , nous dit-il , les coopérations entre les peuples , mais également préserver des choses vitales pour chaque nation : une économie vivrière et une autonomie sanitaire . Il y aura beaucoup de choses à relocaliser et il faudra privilégier les produits utiles et les produits sains » .
D’autres voix demandent de renforcer l’écologie dans l’agriculture , l’agro-alimentaire , les industries , les transports , la construction , des changements qui ont commencé sur le terrain , à la base, dans beaucoup de régions , mais qu’il faudra généraliser .
Plus radical , Cyril Dion , réalisateur du film » Demain » milite , quant à lui , pour aller beaucoup plus loin , pour un monde nouveau . » L’être humain , explique- t’ il , fait avant tout partie d’un système vivant et le sens de sa présence sur terre n’est sans doute pas d’alimenter la croissance économique , mais de découvrir qui il est , de s’épanouir , de coopérer et de laisser le monde un peu meilleur lorsqu’il disparaîtra . Promouvoir ces récits peut se faire de mille et une façons , par des films , des médias , en inventant de nouvelles façons de faire de l’agriculture , de nouveaux systèmes démocratiques . » Et bien sûr , et Cyril Dion en est très conscient comme nous, il faudra engager de nombreuses luttes si l’on veut faire bouger les choses . On peut citer l’achat choisi et le boycott pour tout ce qui concerne la consommation , les mobilisations de rue et la désobéissance civile sans oublier l’engagement politique et la présence dans les élections .
Voilà quelques idées , quelques pistes , pour la réflexion collective pour repenser le monde. Il est temps .
Jean-Pierre Laval , journaliste . Libre opinion pour Radio Lengadoc 95.5 f.m .